LE BOULIER CHINOIS

Technique : Principes de base,
équivalence entre numération écrite de position et boulier

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Qu'appelle-t-on numération de position ?

Un nombre entier quelconque N peut être considéré comme la valeur numérique d'un polynôme P(x), le polynôme étant à coefficients entiers positifs, inférieurs à x, x entier positif ; x est la base de la numération.

P(x) = amxm + am-1xm-1 + ... + am-pxm-p + ... + a0

Chaque monôme est porteur de deux informations :am-p et xm-p .
En numération de position, ce nombre N est symboliquement représenté sous la forme :
am am-1 ......am-p ......a0
Dans une telle écriture, seuls les coefficients subsistent. Il semblerait que la deuxième information ait été perdue. La seconde information n'est cachée qu'en apparence puisqu'elle exprime de manière parfaite la position occupée par am-p dans l'écriture du nombre.
Dans la numération de position, on associe à tout chiffre am-p deux informations distinctes symbolisées par deux nombres entiers positifs. On peut donc imaginer une représentation analytique de ce nombre en portant en abscisse, pour chacun de ses chiffres am-p, le nombre d'unités contenues dans ce chiffre et en ordonnée, le rang du chiffre considéré (m-p). Il semble que la présentation analytique du nombre écrit en numération de position ne nous apporte rien de nouveau. Son intérêt n'apparait que si l'on décide d'égrener les unités composant la valeur numérique symbolisée par chaque chiffre, sous la forme de cercles égaux, centrés sur l'axe des X ou sur une parallèle à cet axe. Le nombre considéré apparaît tel qu'il serait représenté sur un boulier.

Illustrons ceci par un exemple :
Prenons le nombre 1437.
Nous avons :
1437 = P(10) avec P(x) = 1. x3 + 4. x2 + 3. x + 7
Cette écriture nous fournit les représentations analytiques suivantes, où la valeur numérique des coefficients est portée en abscisse, et le rang de chaque coefficient en ordonnée :

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Les créateurs de cet instrument ont donc fait de la géométrie analytique sans le savoir.
Du boulier, on passe immédiatement à la numération écrite de position à la seule condition de choisir des symboles pour exprimer tous les nombres inférieurs à la base. Inversement, on passe, par l'intermédiaire d'une représentation analytique, de la numération écrite de position au boulier.

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Il existe donc une véritable équivalence entre un nombre présenté sur le boulier et ce même nombre écrit en numération de position.
Deux calculateurs, qui n'ont pas la même langue mais qui utilisent une numération écrite de position de même base, représenteront de manière identique un nombre donné sur leur boulier.
Il s'agit du même nombre puisqu'il est représenté sur le boulier de manière unique.

La numération figurée la plus parfaite est donc celle du boulier : elle a un caractère universel pour une base donnée.

Seules, l'unité, la base et les puissances successives de la base seront représentées sur les tiges du boulier.
L'en-tête a généralement disparu en regard de chacune de ses tiges.
La représentation linéaire d'un nombre écrit en numération de position réduit son expression analytique à la seule ordonnée.
Il est naturel de commencer par les grandes puissances de la base.
Sur le boulier, en général, le premier nombre inscrit peut l'être de manière quelconque, l'origine des ordonnées peut ne pas être précisée.
Il est alors indispensable de marquer la place des unités simples par un signe distinct dans la présentation écrite du nombre et de préciser sur le boulier la position de l'origine.

Pour obtenir, à partir du polynôme fondamental, la numération écrite de position de la meilleure qualité, il convenait d'envisager séparément et exclusivement les deux informations contenues dans chaque monôme de ce polynôme. Ceci est aussi vrai pour le boulier.

Avec la table à compter, on peut ultérieurement décider de supprimer l'en-tête, ce qui le présentera sous la forme d'un simple échiquier sur lequel on placera les cailloux. Que les cailloux soient remplacés par de petits bâtonnets et voici la numération figurée chinoise. Si l'on va au delà, on peut imaginer de remplacer les petits cailloux par des billes que l'on enfilera sur des tiges fixées rigidement, à l'en-tête lui-même indéformable. Et voici le boulier sous sa forme parfaite, instrument qui a même le mérite d'être portatif.

L'origine commune de la numération écrite de position et du boulier explique l'identité de leur conception, ce qui a permis aux chinois de présenter le nombre sous sa forme la plus abstraite.


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